Frères et sœurs,
A-t-on confiance en Dieu et à quoi cette confiance se mesure-t-elle ?
Les temps difficiles sont certainement ce qui met à l’épreuve les engagements les plus solides et les plus sincères.
Les temps difficiles évaluent, mettent sur la balance notre capacité à garder confiance et à se relever pour repartir dans la vie. On peut toujours se relever si on a une source de confiance.
Un film illustre bien ce thème de toujours vaincre l’injustice et le désespoir par la confiance et la persévérance. C’est déjà un vieux film : « A la recherche du bonheur » avec l’acteur Will Smith.
C’est l’histoire vraie de Chris Gardner, un modeste représentant de commerce que sa femme finit par quitter car elle n’en peut plus des difficultés financières. Elle le laisse avec leur fils Christopher âgé de cinq ans. Chris se retrouve à la rue avec son fils. Chris fait alors la rencontre d’un riche coursier en bourse et décide de lui aussi devenir coursier et de se mettre à la poursuite du bonheur. Au fond du trou, il décide de se relever. Grâce à sa force de caractère et à sa persévérance, il va réussir à surmonter chaque source de découragement, il va réussir ses études et monter sa propre affaire. Il connaîtra le succès. Il passera de la galère à la fortune à cause de sa persévérance.
Les temps difficiles et leurs effets dans nos vies ne sont pas appelés à demeurer toujours. C’est certainement ce que ce texte veut nous enseigner à travers la parabole qui nous est racontée.
Jésus enseigne à ses disciples que les temps difficiles arrivent et que cependant il leur faudra malgré tout garder confiance dans l’avenir et dans la fidélité de Dieu jusqu’à la venue du Fils de l’Homme, car Dieu veille sur ses élus.
Malgré les apparences l’heure de Dieu vient.
Malgré les apparences Dieu n’abandonne pas les siens.
Malgré les apparences il faut continuer à faire confiance à Dieu.
Mais sur quoi repose cette confiance ?
Comment la parabole répond à cette question ? Elle met en son centre non pas la veuve opiniâtre comme on pourrait le penser mais le juge. Un juge qui n’a d’égard pour personne : ni pour Dieu ni pour les hommes. Jésus nous invite à « extrapoler ce récit et à l’appliquer à Dieu ».
Vous voyez ce juge, dit-il ? Dieu est le contraire de ce juge. Dieu a de l’égard pour lui-même et il est fidèle. Il est le garant de sa fidélité. Il est fidèle à sa Parole, à ses promesses et à ce qu’il révèle de lui-même.
Et ce n’est pas par hasard si la parabole met en scène une veuve. La veuve est dans la Bible le symbole de la faiblesse. Il s’agit d’une personne qui n’avait aucun homme pour pourvoir à sa protection et à ses besoins, ni mari, ni beau-père, ni fils. C’est la fragilité même. À cause de sa fragilité sociale, la veuve était victime d’oppression, d’injustice et d’exploitation.
Et quand elle n’avait aucun protecteur mâle, Dieu était considéré comme son défenseur et chaque Israélite devait la traiter avec justice.
Plusieurs sentences garantissent la protection divine à la veuve et à l’orphelin. Dieu défend le droit de la veuve et de l’orphelin selon Deutéronome 10, 18. Dieu ordonne de ne jamais affliger la veuve et de se mettre en colère contre ceux qui l’accableraient en Exode 22, 21-23.
Alors si ce juge inique est capable de rendre justice à cette femme, àcombien plus forte raison Dieu, qui s’engage dans sa Parole, ne le ferai soudainement !
Les besoins des élus de Dieu lui vont droit au cœur, il leur apportera le salut de toute façon, même d’une façon soudaine. Les disciples du Christ doivent vivre avec cette assurance que Dieu les délivrera de toutes leurs angoisses même s’ils doivent persévérer dans l’attente.
Ce texte peut aussi être lu à un autre niveau, celui de la voix enfin entendue des faibles dont la veuve est emblématique. La justice peut aussi s’obtenir par des institutions justes, peu importe les hommes qui y sont mis en responsabilité. Le juge, même faillible, représente une institution garante de la justice au cœur de la société. L’institution juste finit toujours par dépasser l’injustice et même à en être juge, au cours de l’histoire. Alors parce que cette institution existe, les faibles, les démunis, les oubliés peuvent se battre avec persévérance pour être entendus et que justice leur soit rendue. La prière ne doit pas être un abandon de son identité de citoyen mais au contraire elle peut être comparée à l’attitude citoyenne pour obtenir la défense de sa cause.
Les disciples du Christ doivent apprendre à vivre dans la confiance que ce soit comme citoyen, que ce soit comme croyant ! Mais cette confiance doit s’entretenir par l’Esprit.
Comment donc entretenir cette confiance ?
La solution retenue dans le témoignage de Luc c’est la prière : « Il leur disait une parabole pour leur montrer qu’il faut toujours prier sans se lasser ». Pour entretenir la confiance, il faut prier. Ainsi Luc invite à la vraie prière, celle qui se fonde dans la foi.
Foi et prière se nourrissent mutuellement comme le pense Saint Augustin quand il dit : « Lorsque la foi s’éteint la prière cesse. Croyons donc afin de prier et afin que la foi ne s’éloigne pas, prions. La foi produit la prière et la prière à son tour, obtient l’affermissement de la foi. ».
C’est pour cette raison même que la prière est au cœur de la spiritualité chrétienne. Pour entretenir la foi et la transmettre les hommes ont prié sans cesse. La tradition chrétienne est riche de réflexions pour que le déroulement de la journée et de la nuit soit consacré à la prière et à la louange de Dieu.
Aujourd’hui nous avons du mal avec la prière ! Certains se demandent si la prière est nécessaire, si ce n’est pas forcer la main de Dieu que de prier. Mais si comme le pense Saint Augustin la prière entretient la foi, si la prière venait à disparaître Le Fils de l’Homme, quand il viendra, trouvera-t-il la foi sur la terre ? Cette question restera sans réponse jusqu’à la venue du Fils de l’Homme !
Et maintenant posons-nous à nouveau la question : pourquoi prier ?
Comme la veuve, même dans la faiblesse, il faut être persévérant. La prière exige la persévérance. Nous nous expliquons difficilement la patience de Dieu à rendre justice aux siens. Mais la persévérance abolit le temps et ne renonce jamais. Elle replace l’humain dans l’attente. Elle est là pour entendre l’impuissance, pour s’identifier à la colère et à la rage contre l’injustice. Elle est attente de justice et de renversement de situation contre toute logique. Elle renonce au découragement. La persévérance se joue des oppositions et n’arrête jamais ses efforts vers la réussite finale.
Dans l’enseignement du Christ rapporté par Luc il apparaît que parfois l’exaucement tarde, demeure caché et mystérieux. C’est pourquoi il faut encore et encore demeurer persévérant dans la foi. Même si tu ne le comprends pas toujours, Dieu agit patiemment. En dépit de toutes les apparences, de toutes les épreuves, il s’agit de compter sur Dieu et de demeurer dans la prière de foi. Dans ces circonstances la prière est un secours et renforce l’attente du rétablissement de sa situation personnelle sans jamais désespérer.
La prière persévérante révèle une attitude intérieure, une confiance que le temps et les circonstances n’altèrent pas.
Demeurons ferme dans la prière ! Prions pour nous-mêmes et pour les autres, persévérons dans l’espérance !